Rsg Production

Families Like Ours

 
Familier som vores
 
[TV]
Mini-série / Miniseries
 

2024/2025

FR                   EN

 

Au Danemark, la montée progressive des eaux n’est plus viable pour l’économie du pays poussant le gouvernement à se résoudre à un exil forcé et généralisé. Pour sa première série, Thomas Vinterberg outrepasse donc les projections en imaginant une montée des eaux d’une telle envergure que l’ensemble des habitants soit contraint d’évacuer et tout recommencer de zéro dans d’autres pays européens. Le peuple danois se disperse ainsi et devient une diaspora laissant derrière elle, maisons, écoles, et rues désertes. Alors que familles et amis sont séparés, qu’un pays s’efface, l’économie n’a plus de valeur … mais les sentiments demeurent.

Cette dystopie, le réalisateur de « Festen », « La Chasse » ou plus récemment de l’oscarisé « Drunk » la traite comme un matériau réaliste en dressant le portrait d’une poignée de personnages et à travers eux d’une nation qui s’éparpille. Ce n’est pas une série catastrophe, les choses arrivent lentement de sorte que la montée des eaux reste hors-champ. La dystopie est alors moins dans la catastrophe climatique que dans l’inversion sociale examinant la capacité des Européens de l’Ouest à vivre la condition qui est aujourd’hui celle des migrants. Si le concept n’est donc pas encore à l’heure du jour et pas forcément très crédible non plus (l’exil de tout un pays), il est traité de manière hyperréaliste et bien documenté sur les politiques d’accueil des réfugiés dans les différents pays européens.

Moins que la catastrophe climatique, le sujet est donc bien la dissolution des privilèges en adoptant le point de vue d’une bourgeoisie peu à peu dépossédée de son confort et de ses biens. Vinterberg met en scène cette inversion du flux migratoire sans ironie pour questionner ce qu’il reste lorsque des privilégiés perdent tout … le déchirement des familles et l’amour des siens, d’où le titre qui n’évoque pas la dystopie environnementale. C’est finalement une étude des liens familiaux et affectifs dans un contexte qui pousse à les exacerber ou les briser. « Families Like Ours » est ainsi un drame intimiste traversé par le sentiment d’impuissance et l’exode de la solidarité qui dépeint la condition humaine dans toute sa complexité.

Quasiment sans musique et sans artifice, c’est une série qui prend le temps de mettre en scène ses personnages (tous plus ou moins liés autour d’un noyau familial), peut-être même un peu trop en démultipliant ses protagonistes. On a parfois l’impression que les personnages font beaucoup de mauvais choix, mais il est bien sûr facile de juger dans notre position, ce qui rappelle inévitablement la fragilité des choix dans ces situations. Malgré quelques faiblesses narratives et de rythme, « Families Like Ours » reste une série émouvante qui nous place à hauteur de personnages dans un contexte politico-environnemental précisé par flash info à la radio au fur et à mesure. C’est une série multilingue, assez froide, parfois très triste qui parvient dans ses meilleurs moments à concilier un point de vue collectif d’une société avec un effet de loupe sur quelques hommes et femmes dont on observe la transhumance.

Raphaël Sallenave
 

In Denmark, the increasing rise in water levels is no longer sustainable for the country’s economy, forcing the government to settle for forced, widespread exile. For his first series, Thomas Vinterberg therefore goes beyond forecasts by imagining a rise in water levels on such a scale that the entire population is forced to evacuate and start all over again from scratch in other European countries. The Danish people thus scatter and turn into a diaspora, leaving behind deserted homes, schools and streets. As families and friends are separated, as a country fades, the economy loses its value… but feelings remain.

The director of “Festen”, “The Hunt” and, more recently, the Oscar-winning “Another Round”, approaches this dystopia as realistic material, portraying a handful of characters and, through them, a nation that is drifting apart. It’s not a disaster show; things happen slowly, leaving the rising waters off-screen. The dystopia is then, less about climate catastrophe than it is about social reversal, examining the ability of Western Europeans to cope with the condition of today’s migrants. While the concept is not yet up to date, and not necessarily very likely either (the exile of an entire country), it is dealt with in a hyper-realistic and well-documented way, with regard to refugee policies in various European countries.

Rather than climate crisis, the theme is really the collapse of privilege, from the point of view of a bourgeoisie gradually dispossessed of its comforts and property. Vinterberg stages this reversal of the migration flow without irony, to question what remains when the fortunate lose everything… the tearing apart of families and the love of one’s own, hence the title, which does not refer to an ecological dystopia. Ultimately, it’s a study of family and emotional ties in a context that tends to exacerbate or break them. “Families Like Ours” is thus an intimate drama rooted in feelings of powerlessness and the exodus of solidarity, depicting the human condition in all its complexity.

With almost no music or artifice, this is a series that takes its time to set the scene for its characters (all more or less bound around a family circle), perhaps even a little too much by multiplying its protagonists. We sometimes get the feeling that the characters make a lot of bad choices, but of course it’s easy to judge from our perspective, which inevitably reminds us of the frailty of choices in these situations. Despite some narrative and pacing shortcomings, “Families Like Ours” remains a moving series that brings us down to character level in a political-environmental context clarified by radio newsflash as it goes along. It’s a multilingual, fairly cold, sometimes very sad series that manages in its best moments to balance a collective point of view of a society with a close-up view of a few men and women whose migration we witness.

Raphaël Sallenave
Greyzone
Flow