Priscilla
Coupe Volpi (Cailee Spaeny) – Venise
2023/2024
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Après un extravagant « Elvis » signé Baz Luhrmann il y a deux ans, voici l’autre pendant d’un célèbre couple beaucoup plus terre-à-terre : « Priscilla », par Sofia Coppola. La réalisatrice nous y présente la vie mélancolique de Priscilla Beaulieu, épouse Presley, dans un long-métrage calme et posé, inspiré de l’autobiographie de cette même Priscilla. Une approche bien différente de ce que l’on pourrait idéaliser du couple Presley – à tel point qu’aucune chanson du King ne fait partie de la bande originale.
Linéaire, le film nous raconte l’histoire de cette adolescente devenue femme par le prisme de sa relation cahoteuse avec une superstar. Priscilla, encore mineure lors de sa rencontre avec Elvis en Allemagne de l’Ouest, découvre un homme et un univers d’apparence affables et merveilleux, jusqu’à ce que la célébrité et sa jeunesse manquée la rattrapent. Un long et lent désenchantement, saupoudré de moments joviaux mais qui rapidement laissent place à l’ennui et à la solitude, ou bien à des escarmouches quelquefois violentes.
Si le long-métrage et son personnage principal prennent clairement (et un peu trop) leur temps dans leur narration, la mise en scène de « Priscilla » témoigne d’un joli travail. Outre les beaux décors et costumes, les prises de vue sont propres, précises, raffinées – quoiqu’un peu conventionnelles : en ressort une ambiance de pureté, peu à peu assombrie par la tournure que prennent les amours de Priscilla et son mari absent, détaché et fêtard.
Retraçant la vie ordinaire d’une femme au foyer extraordinaire, Sofia Coppola nous invite ainsi à réfléchir sur la difficulté de s’épanouir dans une relation née d’une flamme apparue précipitamment puis s’éteignant imperceptiblement. L’amour que nous croyons salvateur devient alors lui aussi une cage dont « Priscilla » nous pousse à sortir afin de nous libérer, d’exister sans les contraintes que peuvent sceller un mariage glorifié. Le film aurait malgré tout mérité d’être un peu plus palpitant, à moins que Sofia Coppola ait justement fait le choix de cette triste dégénérescence pour mieux souligner la désillusion d’une femme qui pensait pouvoir être amoureuse et heureuse.
Axel Chevalier
After Baz Luhrmann’s extravagant “Elvis” two years ago, here’s Sofia Coppola’s more down-to-earth counterpart to a famous couple: “Priscilla”. She depicts the melancholy life of Priscilla Beaulieu, wife of Presley, in a calm and composed feature film inspired by Priscilla’s autobiography. It’s a very different approach to what we might imagine of the Presley couple – so much so, in fact, that none of the King’s songs are featured on the soundtrack.
This linear film tells the story of a teenage girl who becomes a woman through the prism of her rocky relationship with a superstar. Priscilla, still underage when she meets Elvis in West Germany, discovers a seemingly friendly and wonderful man and world, until fame and her missed youth catch up with her. A long, slow disenchantment, sprinkled with jovial moments that soon give way to boredom and loneliness, or sometimes violent skirmishes.
While the film and its main character clearly take their time (and a bit too much) in their narrative, the direction of “Priscilla” displays a great deal of craftsmanship. In addition to the beautiful sets and costumes, the shots are neat, precise and refined – although a little conventional: what emerges is an atmosphere of purity, gradually overshadowed by the turn Priscilla’s love affair with her absent, detached, party-going husband takes.
Capturing the ordinary life of an extraordinary housewife, Sofia Coppola invites us to reflect on how difficult it is to thrive in a relationship born of a fire that appears precipitously and then imperceptibly extinguishes itself. The love we think saves the day also becomes a prison from which “Priscilla” urges us to break free, to live without the shackles of a glamorized marriage. Still, the film would have deserved to be a little more gripping, unless Sofia Coppola had chosen this sad degeneration to underline the disillusionment of a woman who thought she could be in love and happy.
Axel Chevalier