Rsg Production

Queendom

 
 

2023/2025

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En ce mois des fiertés, il devient à mon sens de plus en plus nécessaire de mettre en valeur les magnifiques parce que plurielles et infinies identités LGBTQIA+, parce que sempiternellement menacées en Hongrie comme en Ouganda, en Iran comme au Ghana, en Russie comme en France. Et c’est justement dans ces deux derniers pays que ce documentaire (sorti en France le 1er janvier 2025) a été tourné et conçu par la réalisatrice russe Agniia Galdanova, pendant plus de trois ans, entre 2019 et 2023.

Tout commence à Magadan. C’est de cette triste ville-symbole du goulag soviétique et de la Kolyma, en Extrême-Orient, au bord de la Mer d’Okhotsk, qu’est originaire l’artiste Gena Marvin. C’est là qu’elle a grandi, adoptée par ses grands-parents, avant de tenter de s’émanciper artistiquement à Moscou. Mais son activisme politique, son apparence, sinon sa vie, sont une bataille quotidienne contre une partie de la société et les autorités de la Fédération de Russie.

L’œuvre de Gena Marvin, qu’on pourrait qualifier de drag extrême, est si puissante qu’Agniia Galdanova, qui au départ misait sur une série de portraits d’artistes queer aux quatre coins de la Russie, a décidé de consacrer tout un long-métrage à ce personnage haut en couleurs. Le documentaire est ainsi ponctué de plusieurs performances visuelles et hypnotiques où Gena arbore des costumes impressionnants dans des paysages et des lieux surréels, performances qui tranchent avec la dure réalité de l’artiste.

Car Gena subit, à de très nombreuses reprises, en raison de son art et de son identité, des violences verbales, physiques et institutionnelles que peu de gens pourraient endosser. Fusent ainsi les regards, les insultes et les menaces qui terrifient mais devant lesquels elle ne recule pas, elle qui se sent « comme un chevalier dans son armure » lorsqu’elle est maquillée et déguisée. Parce que Gena suscite aussi l’admiration – même en Russie –, notamment lorsqu’elle s’exprime à sa façon contre le lancement de l’« opération militaire spéciale » en Ukraine.

« Queendom » relate enfin le rapport ambigu et parfois tumultueux qu’entretient Gena avec ses grands-parents de Magadan (en particulier avec son grand-père) qui, malgré l’immense fossé qui les sépare, l’aiment et tâchent de la soutenir, même lorsqu’elle quitte précipitamment Moscou pour Paris – où elle a depuis obtenu le statut de réfugiée. Intime, politique, artistique et porteur d’un beau message de tolérance, ce documentaire est donc vital parce qu’il recolle quelques petits morceaux de vie dans un monde mortifère qui ne semble que se fragmenter.

Axel Chevalier

 

In this Pride Month, I think it’s becoming increasingly necessary to highlight the magnificent because plural and infinite LGBTQIA+ identities, because they are endlessly threatened in Hungary as well as in Uganda, in Iran as well as in Ghana, in Russia as well as in France. And it is precisely in the latter two countries that this documentary (released in France on January 1, 2025) was shot and created by Russian director Agniia Galdanova, over a period of more than three years, from 2019 to 2023.

It all begins in Magadan. Artist Gena Marvin hails from this sad symbolic city of the Soviet gulag and Kolyma in the Far East, on the shores of the Sea of Okhotsk. It was there that she grew up, adopted by her grandparents, before striving for artistic emancipation in Moscow. But her political activism, her appearance, if not her life, is a daily battle against a portion of society and the authorities in the Russian Federation.

Gena Marvin’s work, which could be described as extreme drag, is so powerful that Agniia Galdanova, who had originally planned to make a series of portraits of queer artists across Russia, decided to devote an entire feature-length film to this colorful character. The documentary is thus characterized by several visual and hypnotic performances in which Gena wears impressive costumes in surreal landscapes and places, performances that stand in stark contrast to the artist’s harsh reality.

Because of her art and her identity, Gena is repeatedly subjected to verbal, physical and institutional violence that few people would be able to bear. The stares, insults and threats are terrifying, but she doesn’t shy away from them, feeling “like a knight in shining armor” when wearing make-up and disguises. Because Gena is also admired – even in Russia – when she speaks out in her own way against the deployment of the “special military operation” in Ukraine.

Finally, “Queendom” also explores Gena’s ambiguous and sometimes tumultuous relationship with her grandparents in Magadan (particularly her grandfather) who, despite the huge gap between them, love and support her, even when she hastily leaves Moscow for Paris – where she has since been granted refugee status. This documentary is therefore a vital document that is intimate, political, artistic and conveys a beautiful message of tolerance, as it picks up the pieces of life in a mortifying world that only seems to be fragmenting.

Axel Chevalier

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