The Gazer
Gazer
Best Screenplay – BHFF
2025
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“Focus. What do you see?” Dès la toute première séquence de ce long-métrage, l’on se sent transporté loin, très loin du monde tel qu’on le connaît. Mais c’est ainsi que le perçoit ou croit le percevoir Frankie, femme aux multiples troubles et dont le rapport au temps est brouillé. Si brouillé qu’elle vit de façon analogique, presque hors du cadran. Si bien que ses points de repères sont de plus en plus confus et que son existence oscille entre mirages, errances et cauchemars. Alors lorsqu’elle s’engage à rendre service à une inconnue moyennant paiement, elle bascule progressivement et définitivement dans la discordance et le flou.
“Where do you think they’re coming from, hiding from?” Fruit d’incommensurables efforts, « The Gazer » est le tout premier long-métrage de Ryan J. Sloan, électricien de formation, qui vient enfin de réaliser son rêve d’enfant : celui de concevoir un film. Intégralement imaginé, tourné et financé par les propres moyens de R.J. Sloan et ceux d’Ariella Mastroianni (qui incarne à la perfection Frankie à l’écran), ce bijou du cinéma indépendant états-unien est un film personnel, réfléchi et percutant qui nécessite plusieurs visionnages et plusieurs clefs de lecture. Son scénario en spirale est en effet particulièrement énigmatique, notamment parce qu’il joue sur l’absolue confusion et le doux chaos intérieurs de Frankie. Le film constitue ainsi un sombre thriller méticuleux où diverses réalités et hallucinations s’entremêlent, et où la vérité ne transparaît pas toujours comme l’on peut le penser.
“If you feel yourself zoning out, rewind tape.” Tourné en pellicule de 16 mm avec une caméra Arri SR2 (dont feu le premier propriétaire est la personne à qui est dédiée le film), « The Gazer » dispose d’une image qui a manifestement un grain, ce qui nous plonge directement dans l’univers physique et mental tortueux de Frankie. Et bien que les changements de couleurs distinguent les purs cauchemars (aux teintes chaudes, jaunes, marron) des dures réalités (aux teintes froides, bleues, grises), les scènes nocturnes, le montage et nombre de détails visuels une fois assemblés créent une seule et même atmosphère étouffante, à part. Ambiance qui ne serait enfin pas aussi angoissante sans la musique hypnotique, magnétique voire horrifique de Steve Matthew Carter, dont les compositions traumatisent autant qu’elles envoûtent. « The Gazer », qui marque et perturbe, ne pourra que semer le trouble chez le public et deviendra à coup sûr un incontournable du cinéma de genre pour qui appréciera la folie de ce long-métrage.
Axel Chevalier
“Focus. What do you see?”. From the very first moment of this feature film, we feel transported far, far away from the world as we know it. This is how Frankie perceives it, or thinks she does. She’s a woman of many disorders, whose sense of time is so blurred that she lives analogically, almost off the clock. As a result, her bearings become increasingly confused, and her existence oscillates between daydreams, wanderings and nightmares. So, when she agrees to help a stranger for a fee, she gradually and definitively falls into a state of discordance and vagueness.
“Where do you think they’re coming from, hiding from?”. “Gazer” is the result of immeasurable effort on the part of Ryan J. Sloan, a trained electrician who has finally realized his childhood dream of making a film. Entirely imagined, shot and financed by R.J. Sloan’s own resources and those of Ariella Mastroianni (who plays Frankie to perfection on screen), this gem of American independent cinema is a personal, thoughtful and powerful film that requires several viewings and several interpretation keys. Its spiraling script is particularly enigmatic, not least because it exploits Frankie’s absolute confusion and gentle inner chaos. The film is thus a dark, meticulous thriller where different realities and hallucinations intermingle, and where the truth doesn’t always come out as you might think.
“If you feel yourself zoning out, rewind tape.” Shot on 16mm film with an Arri SR2 camera (whose late first owner is the person to whom the film is dedicated), “Gazer” features a picture that is clearly grainy, drawing us directly into Frankie’s tortuous physical and mental world. And although the color shifts distinguish pure nightmares (with warm, yellow, brown hues) from harsh realities (with cold, blue, gray hues), the night scenes, the editing and many of the visual details once assembled create a single, suffocating atmosphere all their own. An atmosphere that wouldn’t be nearly as eerie without the hypnotic, magnetic, even horrific music of Steve Matthew Carter, whose score is as traumatic as it is haunting. “Gazer” is both disturbing and striking, and is sure to become a must-see in genre movies for anyone who relishes the madness of this film.
Axel Chevalier