Le Village aux portes du Paradis
The Village Next to Paradise
2024/2025
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Dans un village en bord de mer nommé Paradis, une petite famille somalienne tente de rêver et de rester optimiste. Mamargade fait de son mieux pour rendre service à sa communauté et pour que son fils Cigaal se rende à l’école, tandis que sa sœur Araweelo désire ouvrir une petite échoppe de vêtements.
Premier long-métrage du réalisateur austro-somalien Maxamed Harawe – dit Mo Harawe –, « Le village aux portes du paradis » s’éloigne considérablement des clichés rabâchés par des Occidentaux incapables de placer la Corne de l’Afrique sur une carte ou de détacher la Somalie de la piraterie, de la guerre civile ou du terrorisme islamiste qu’ils ne cherchent même pas à comprendre. Le cinéaste né à Mogadiscio dépeint au contraire dans ce film une société certes affectée par les quotidiennes attaques de drones et les incommensurables difficultés économiques, mais forte et soudée face à l’adversité.
À travers un triple portrait inscrit dans une forme de chronique de la vie locale, Mo Harawe présente des personnages droits et dignes qui revêtent à leur façon les défis du quotidien somalien : Cigaal souhaite rester dans son village malgré la fermeture de son école et ne pas étudier en ville dans un pensionnat privé, pendant qu’Araweelo affronte les obstacles financiers et sociaux avec son projet de boutique en tête, et tandis que Mamargade enchaîne les petits boulots et les coups de main, quitte à accumuler les problèmes. Le film embrasse de surcroît la notion plus large de famille qui englobe à la fois les proches, les voisins et les clans – ces derniers structurant la nation somalie depuis des siècles –, famille dans laquelle on partage certes les douleurs et les peines, mais aussi des moments plus légers et plus heureux.
Offrant aussi pour mots leurs regards et silences battus par le vent, les personnages sont joués par des non professionnels recrutés sur place (à l’instar d’une très grande partie de l’équipe du long-métrage), ce qui renforce l’authenticité et le réalisme des différentes intrigues – l’exemple le plus évocateur étant l’incapacité de Cigaal dans sa nouvelle école à lire l’arabe, lui qui n’écrit et parle qu’en somali. Avec enfin une photographie signée de l’Égyptien Mostafa El-Kashef, le rendu visuel du film transmet l’idée de son titre, à savoir un lieu à la fois coloré et desséché, potentiellement paradisiaque mais qui ne l’est pas vraiment, nonobstant les quelques espoirs (parfois presque automatiques) des gens qui y vivent. « Le village aux portes du paradis » montre ainsi une facette belle mais méconnue d’un peuple résilient et qui malgré ses tourments est tourné vers l’avant.
Axel Chevalier
In a seaside village called Paradise, a small Somalian family tries to dream and stay optimistic. Mamargade does his best to help his community and get his son Cigaal to school, while his sister Araweelo wants to open a small clothing shop.
The debut feature from Austrian-Somalian director Maxamed Harawe – aka Mo Harawe – “The Village Next to Paradise” is a far cry from the clichés perpetuated by Westerners unable to locate the Horn of Africa on a map, or to detach Somalia from the piracy, civil war and Islamist terrorism they don’t even try to understand. On the contrary, the Mogadishu-born filmmaker’s film depicts not only a society affected by daily drone attacks and immeasurable economic difficulties, but also one that is strong and united in the face of adversity.
In a triple portrait that chronicles local life, Mo Harawe depicts upright, dignified characters who take on the challenges of everyday Somalian life in their own way: Cigaal wants to stay in his village despite the closing of his school and not study in the city at a private boarding school, while Araweelo faces financial and social obstacles with her store business project, and Mamargade takes on a series of odd jobs and extra services to help out, even if it means accumulating problems. The film also embraces the broader notion of family, encompassing relatives, neighbors and clans – the latter of which have structured the Somali nation for centuries – a family in which pain and sorrow are shared, but also lighter, happier moments.
The characters are played by non-professionals cast on location (as is the case for a large part of the film’s crew), offering words in the form of gazes and silences beaten by the wind, which adds to the authenticity and realism of the various plots – the most striking example being Cigaal’s inability to read Arabic in his new school, as he only writes and speaks Somali. With cinematography by Egyptian Mostafa El-Kashef, the film’s visual impact conveys the idea of its title: a place that is both colorful and parched, potentially paradisiacal but not really, notwithstanding the few (sometimes almost automatic) hopes of the people who live there. “The Village Next to Paradise” therefore shows a beautiful but little-known facet of a resilient people who, despite their torments, look to the future.
Axel Chevalier