Rabia
Prix du Public – Efferscence (Mâcon)
2024
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Alors qu’Alep vient tout juste de retomber aux mains des djihadistes suite à une offensive éclair, « Rabia » ne peut que s’inscrire de manière brutale dans l’actualité. Réalisé par Mareike Engelhardt, le film traite d’un sujet brûlant mais aussi tabou dans la plupart des pays d’Europe : celui de l’endoctrinement des femmes par l’État Islamique. L’on y suit ainsi le parcours de Jessica, jeune Française qui rejoint l’organisation terroriste et totalitaire en plein cœur de la guerre, à Raqqa, afin d’apporter une aide idéologique mais surtout procréatrice aux combattants. Jessica devient alors Oum Rabia.
Dur et épuré, « Rabia » forme un quasi-huis-clos où l’on montre la violence de l’intérieur, non pas domestique, mais fanatique, et féminine. L’essentiel de l’intrigue se déroule dans une madafa, une « résidence » comme il en existe des dizaines, réservées aux femmes radicalisées et embrigadées, vouées (et souvent contraintes) à être mariées et à enfanter. Le long-métrage s’inspire par ailleurs de nombreux témoignages de victimes de ces « maisons », ainsi que du personnage ô combien monstrueux et tristement réel de Fatiha Mejjati, alias Oum Adam, qui a (entre autres atrocités et crimes contre l’humanité) tenu d’une main de fer ces « institutions » au service de Daech.
Outre son thème spécifique et peu abordé, « Rabia » marque de par l’interprétation de ses deux principales actrices : la convaincante Megan Northman pour Jessica et la majestueuse Lubna Azabal pour Madame (propriétaire de la madafa). Le film décrit tout en la dénonçant la spirale du radicalisme islamiste, avec une Jessica qui bascule progressivement dans l’horreur et prend cette dernière pour normale, voire due. Malgré un scénario assez linéaire et peu surprenant, « Rabia » présente quelques scènes frappantes – comme celle de la prière sous les bombardements. En revanche, si le film est d’un intérêt majeur dans le dévoilement de la terreur interne du djihadisme au Moyen-Orient, il aurait certainement mérité de creuser plus profond, quitte à nous traumatiser autant que ces femmes – dont certaines restent encore et malgré tout persuadées que l’État Islamique conquerra le monde…
Axel Chevalier
At a time when Aleppo has just fallen back into the hands of the jihadists following a swift assault, “Rabia” is bound to be brutally relevant to the times. Directed by Mareike Engelhardt, the film deals with a hot topic that is also taboo in most European countries: the indoctrination of women by the Islamic State. It follows the journey of Jessica, a young Frenchwoman who joins the terrorist and totalitarian organization at the heart of the war, in Raqqa, to provide ideological but above all procreative assistance to the fighters. Jessica then becomes Oum Rabia.
Tough and uncluttered, “Rabia” is almost a closed-door film, showing violence from the inside – not domestic violence, but fanatical, feminine violence. Most of the plot takes place in a madafa, a ‘residence’ of which there are dozens, reserved for radicalized and enlisted women, destined (and often forced) to marry and give birth. The film is based on numerous testimonies from victims of these ‘residences’, as well as the monstrous and sadly real character of Fatiha Mejjati, alias Oum Adam, who (among other atrocities and crimes against humanity) held these ‘institutions’ with an iron fist for Daech.
In addition to its distinctive, rarely addressed theme, “Rabia” is characterized by the performances of its two main actresses: the convincing Megan Northman as Jessica and the majestic Lubna Azabal as Madame (the madafa‘s owner). The film depicts and condemns the spiral of Islamist radicalism, with Jessica gradually falling into horror and taking it for granted. Despite a fairly linear and unsurprising script, “Rabia” does feature a few striking scenes – such as the prayer under the bombings. On the other hand, while the film is of major interest in unveiling the internal terror of jihadism in the Middle East, it would certainly have warranted digging deeper, even if it meant traumatizing us as much as these women – some of whom are still convinced that the Islamic State will conquer the world…
Axel Chevalier