Six pieds sur Terre
(Six feet over)
2024
FR EN
Quand on ne se sent plus vivant, la mort – ou du moins son poids – peut nous faire renaître. C’est ce qu’apprend progressivement le jeune personnage de Sofiane, dit Souf, qui, en pleine crise existentielle et menacé d’une expulsion du territoire français, se retrouve à travailler pour des pompes funèbres musulmanes à Roubaix. Ainsi pourrait se résumer le point de départ de « Six pieds sur terre », long-métrage co-écrit et réalisé par Karim Bensalah et sorti en France en juin dernier.
Interprété par un fascinant Hamza Meziani, Souf est d’abord un garçon volage et désinvolte, quelquefois mythomane, qui profite largement de sa situation de fils de diplomate pour se permettre de nombreuses et festives fréquentations. Mais il se révèle petit à petit plus tourmenté qu’il ne le montre, notamment lorsque l’on apprend qu’il a arrêté brutalement ses études et qu’il entretient des relations parfois tendues avec sa famille. Quasi totalement centré sur son héros, « Six pieds sur terre » décrypte en réalité au fil des scènes la complexité de Sofiane, en proie à de profondes interrogations identitaires.
« Tu sais qui je suis ? Moi je ne sais pas. Je ne sais pas du tout. » C’est ce que finit par avouer Souf à sa copine. Enfant du monde, à la croisée des âges et des cultures, Sofiane refuse initialement de se dire arabe tout en affirmant (sérieusement ou non, on l’ignore) que les institutions sont racistes. Toutefois sa rencontre avec ledit El Hadj aux pompes funèbres va changer, adoucir son regard, sur lui-même et sur les autres. Incarné par Kader Affak, le solitaire et taciturne El Hadj apporte de la grâce et de l’apaisement à un Sofiane chaotique et indécis qui alors va mûrir.
Outre la sincérité des personnages, « Six pieds sur terre » propose des choix musicaux judicieux et de nombreux jeux de zooms plus ou moins rapides en fonction du ton et des séquences, illustrant les doutes et les changements d’humeur de son héros. Un film qui se veut naturaliste autant que philosophique et qui nous invite, certes par le biais d’une figure ambivalente, à l’introspection et à la réflexion sur la vie comme sur la fin de cette dernière.
When we no longer feel alive, death – or at least its weight – can bring us back to life. This is what the young character of Sofiane, aka Souf, gradually learns when, in the midst of an existential crisis and facing deportation from France, he finds himself working for a Muslim funeral home in Roubaix. This is the starting point of “Six feet over”, a feature film co-written and directed by Karim Bensalah and released in France last June.
Played by a fascinating Hamza Meziani, Souf is at first a carefree, easygoing, sometimes liar, who takes full advantage of his position as the son of a diplomat to enjoy a wide range of social activities. But he gradually reveals himself to be more tormented than he lets on, especially when we learn that he has abruptly dropped out of school and that his relationship with his family is sometimes strained. Almost totally centered on its hero, “Six pieds sur terre” deciphers Sofiane’s complexity as it unfolds, as he struggles with profound questions of identity.
“Do you know who I am? I don’t. I don’t know at all.” That’s what Souf finally confesses to his girlfriend. A child of the world, at the crossroads of ages and cultures, Sofiane initially refuses to call himself an Arab, claiming (seriously or not, we don’t know) that institutions are racist. However, his encounter with the aforementioned El Hadj at the funeral home will change and soften his view of himself and others. Played by Kader Affak, the lonely, taciturn El Hadj brings grace and calm to a chaotic, indecisive Sofiane, who then matures.
In addition to the sincerity of its characters, “Six feet over” features clever musical choices and a number of zooms that vary in speed depending on the tone and sequence, illustrating the doubts and mood shifts of its hero. The film is as naturalistic as it is philosophical, inviting us, albeit through an ambivalent figure, to introspect and reflect on life and its end.