Rsg Production

The Old Oak

2023

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Cette année 2023 a réuni dans nos salles de cinéma Scorsese, Miyazaki, Scott, Nolan, Fincher, Anderson, Wenders, Kore-Eda, Aronofsky, et Spielberg pour ne citer que certains grands noms internationaux. Il faut évidemment ajouter à cette liste Ken Loach qui présentait au festival de Cannes son dernier film adéquatement intitulé « The Old Oak » (litt. ‘Le vieux chêne). Le réalisateur anglais conclut une carrière de près de 60 ans avec 35 films, dont 5 primés à Cannes et 2 Palmes d’Or. Si son dernier est reparti bredouille du festival, il poursuit une nouvelle fois son style devenu si caractéristique de réalisme social à la frontière du documentaire au sein de la classe ouvrière britannique.
 
« The Old Oak » appartient ainsi à une trilogie produite entre le Royaume-Uni, la France et la Belgique et filmée par Robbie Ryan avec des acteurs non-professionnels après « Moi, Daniel Blake » sur les aides sociales et d’emploi et « Sorry We Missed You » sur l’ubérisation du travail. Ce nouveau film, une nouvelle fois écrit par Paul Laverty, nous ramène dans une petite bourgade aux briques rouges du Nord-Est de l’Angleterre ravagé par la crise industrielle. Nous sommes en 2016 (l’année du référendum du Brexit), TJ tient désormais à bout de bras son pub, dernier espace public du village où les habitués vivent dans la mémoire d’un passé révolu : celui de l’économie minière et des grandes grèves. Quand Yara et d’autres réfugiés syriens arrivent au village dans leur fuite de la guerre contre le régime d’Assad, le village se divise, les tensions montent, et la pauvreté se trompe d’ennemi.
 
Dès le départ la situation est illustrée par TJ qui s’évertue à remettre en place la lettre ‘K’ de son enseigne, il s’agit d’une solution temporaire à une situation foncièrement brisée. Mais dès la scène d’introduction, Ken Loach témoigne ses années de lutte par le cinéma avec son alter-ego Yara et son appareil photo qu’elle utilise pour refléter l’espoir et la force des gens après avoir vu de ses propres yeux les horreurs de la guerre. C’est l’unique rôle qu’il donne à la photographie dans ce film avec en parallèle, les photographies souvenirs de TJ qui romancent les grèves alors que leurs échecs sont visibles partout ailleurs dans le village. Le film met en scène ce parallèle entre deux populations à première vue très différente mais qui partagent finalement les mêmes cicatrices des enjeux géopolitiques et lois du marché qui les dépassent. Réfléchissant comme d’habitude à l’échelle globale tout en œuvrant à l’échelle locale, Loach regroupe ces deux communautés dans une convergence des luttes et une solidarité qui ne peuvent s’envisager que collectivement.
 
Alors oui dans une filmographie exceptionnelle comme la sienne, ce dernier film n’est pas le meilleur, le plus fort, ou le plus bouleversant, mais il touche néanmoins par son regard juste, son talentueux duo Dave Turner & Ebla Mari, et sa profonde foi dans ses valeurs humanistes. S’il est parfois un peu didactique et schématique, rien ne sonne pourtant faux dans ce portrait d’un Royaume-Uni divisé mais où Loach choisit d’y voir la lumière et l’espoir.
 
Ken Loach s’est attaqué à des sujets et des histoires que l’on ne voit pas à la TV ou sur les services de streaming, et « The Old Oak » n’est en cela que la dernière pierre d’un cinéma social engagé, empathique, et humain qui prouve que le vieux chêne est encore là !
Raphaël Sallenave
 
The year 2023 saw the likes of Scorsese, Miyazaki, Scott, Nolan, Fincher, Anderson, Wenders, Kore-Eda, Aronofsky, and Spielberg in our cinemas, to name but a few of the big international names. Of course, Ken Loach must also be added to this list, as he premiered his latest film, appropriately entitled “The Old Oak”, at the Cannes Film Festival. The English director concludes a career spanning almost 60 years with 35 movies, including 5 Cannes awards and 2 Palmes d’Or. Although his latest film left the festival empty-handed, it once again carries on his characteristic style of social realism, bordering on documentary, in the heart of the British working class.
 
“The Old Oak” is thus part of a loose trilogy produced between the UK, France and Belgium and shot by Robbie Ryan with non-professional actors after “I, Daniel Blake” dealing with welfare and employment benefits and “Sorry We Missed You” tackling the uberization of labour. This new film, once again written by Paul Laverty, takes us back to the northeast of England, in a small red-brick town ravaged by industrial crisis. It’s 2016 (the year of the Brexit referendum), and TJ is now running his pub from scratch, the last public space in the village where regulars live in the memory of a bygone past: that of the mining economy and the great strikes. When Yara and other Syrian refugees arrive in the village on the run from the war against Assad’s regime, the village becomes divided, tensions rise, and poverty takes on the wrong enemy.
 
From the outset the situation is illustrated by TJ struggling to put the letter ‘K’ back on his sign, this is a temporary solution to a situation that is fundamentally broken. But right from the opening scene, Ken Loach bears witness to his years of struggle through cinema with his alter-ego Yara and her camera, which she uses to capture the hope and strength of people after seeing the horrors of war with her own eyes. This is the only role he gives to photography in this movie, with in parallel, TJ’s souvenir photographs which romanticize the strikes while their failures are visible everywhere else in the village. The film stages this parallel between two populations that at first glance seem very different, but who in the end share the same scars of geopolitical issues and market laws that affect them all. Thinking, as usual, globally while acting locally, Loach brings these two communities together in a convergence of struggles and a solidarity that can only be understood collectively.
 
Granted, in an exceptional filmography like his, this latest film is not the best, the strongest or the most moving, but it nonetheless hits home with its fair look, its talented duo of Dave Turner & Ebla Mari, and its deep faith in its humanist values. Although sometimes a little didactic and schematic, nothing rings false in this portrait of a divided UK, where Loach chooses to see light and hope.
 
Ken Loach has been tackling subjects and stories that we don’t see on TV or streaming services, and “The Old Oak” is just the latest chapter in a committed, empathetic and humane social cinema that proves that the old oak is still around!
Raphaël Sallenave