The Pitt
[TV]
Saison / Season 1
2025
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On ne compte plus le nombre de séries médicales qui prolifèrent sur nos écrans, un grand classique de la TV américaine depuis « Urgences ». On en voit une, et on les a toutes vues a priori ? Mais si « The Pitt » emprunte évidemment aux thématiques et qualités des précédentes séries du genre, cette nouvelle série s’en distingue grandement par sa structure en temps réel où l’on suit une journée complète d’un service d’urgences auprès d’un ensemble de personnages qui font leur garde, et où, en quelque sorte, nous aussi avec eux, dans ce format d’épisodes d’une heure nous embarquant au cœur de chaque heure du service. Cette structure atypique crée donc une unité de temps à la « 24 Heures Chrono », et impose donc inévitablement un huis-clos : du moment où on entre dans le service d’urgence de cet hôpital de Pittsburgh, on en ressort plus ! C’est un format qui apporte non seulement une cohérence, une fluidité et une intensité évidemment renforcées aux épisodes, mais permet aussi de suivre le travail des médecins et le développement de certaines situations avec les patients durant toute la saison plutôt que d’avoir une série sur un docteur génie ou des épisodes se concentrant chacun sur un cas spécifique. C’est une plongée dans le travail de ces urgentistes, une véritable série d’équipe.
Si cette nouvelle série médicale revient sur des sujets et des critiques du service de santé américain déjà présents ailleurs, elle intègre aussi le profond chamboulement de la pandémie de COVID – au gré d’une chronologie en flash-back succincte et parcellaire comme un cauchemar dont le souvenir traumatique revient par flashs – aussi bien pour les soignants que les souffrants. « The Pitt » s’impose ainsi également comme le reflet de la société américaine d’aujourd’hui où tous les maux d’un système de santé à la dérive s’y retrouvent, du manque de moyens à l’épuisement psychologique de soignants surmenés et sous-payés, en passant par une défiance croissante des patients dans un climat antivax qui conduit (notamment au Texas) à la réémergence de maladies éradiquées depuis longtemps. C’est un scénario militant et assez pédagogique sur le délabrement de la médecine publique, la décriminalisation de l’addiction, les ravages du fentanyl, le désastre des armes à feu, ou encore le droit à l’avortement.
C’est une série qui se veut aussi très technique sur le plan médical en plongeant à fond dans le réalisme, ce qui se retrouve dans sa mise en scène quasi documentaire renforcée par l’absence de musique et d’esthétisation. C’est une chorégraphie non-stop dont la caméra toujours en mouvement donne l’impression de tourner autour de ces médecins dans un espace circulaire sans ligne de fuite où l’action se déroule aussi bien plein cadre qu’en arrière-plan en croisant les différentes opérations ou diagnostics. Cette mise en scène dynamique et ce montage fluide d’une situation à l’autre offrent une narration (intra)nerveuse servie par d’excellents interprètes. S’il y a bien le rôle principal du médecin chef, tous sont développés et nuancés de sorte qu’on s’attache à chacun d’entre eux, sans avoir un seul mauvais personnage. Et le scénario les présente (ainsi que leur cadre de travail) suffisamment bien – via un procédé classique mais efficace, c’est le premier jour de quelques internes qui découvrent donc avec le spectateur le service – pour qu’au bout d’une dizaine d’heures de garde, un tout autre personnel soit introduit de manière fluide et claire instantanément. Alors que les patients ne cessent d’affluer, la vulnérabilité et les failles des humains derrière les blouses sont mises à rude épreuve ajoutant à l’intrigue médicale, un développement personnel nuancé dans les préjugés des uns et des autres.
C’est ainsi à la fois palpitant, très émouvant (même déchirant par moments), mais aussi plus léger à d’autres avec de petites doses d’humour bien placées offrant des respirations nécessaires entre des choix poignants. Si « The Pitt » reprend plusieurs codes conventionnels, elle les développe et les modernise pour un résultat vraiment marquant. Ce renouvellement des codes passe aussi par la diversité du service médical sans que cela ne soit jamais adressé comme sujet (à juste titre). Bref, c’est certes un renouvellement des codes dans l’air du temps, mais il n’est jamais souligné et c’est important de réussir cela justement pour une série médicale qui joue donc des codes classiques de la télévision américaine blanche. Oui, c’est une série ‘procédurale’ mais non seulement elle réussit extrêmement bien sa dimension ‘procédurale’, mais en plus elle y ajoute un rythme à couper le souffle, une précision incroyable, et une overdose d’émotions ! C’est bien simple, c’est une surprise addictive – qui fonctionne par conséquent mieux en binge-watching qu’en visionnage hebdomadaire de par son unité de temps – et s’impose étonnamment comme la meilleure série américaine de ce début d’année …
The number of medical dramas proliferating on our screens is countless, it’s been a classic on American TV since “ER”. Once you’ve seen one, you’ve seen them all, right? Yet, while “The Pitt” obviously draws on the themes and qualities of previous series in the genre, this new one stands out for its real-time approach, in which we experience a full day’s work in an emergency department with a cast of characters who are on call, and where, in a way, we’re on call with them, in this one-hour episode format, taking us right to the heart of every hour on the clock. This atypical structure creates a unity of time a la “24”, and inevitably sets up an in-camera setting: once we enter the emergency department of this Pittsburgh hospital, we never leave it again! It’s a formula that not only brings coherence, fluidity and intensity to the episodes, but also allows us to follow the work of the doctors and the development of certain situations with patients throughout the season, rather than having a series about a genius doctor or episodes each focusing on one specific case. This is a process series, truly a team series.
While this new medical show revisits issues and concerns of the U.S. health service already addressed elsewhere, it also embraces the profound upheaval of the COVID pandemic – through a brief, fragmented flashback timeline like a nightmare whose PTSD surfaces in flashes – for caregivers and sufferers alike. In this way, “The Pitt” also stands out as a mirror of today’s American society, where all the ills of a healthcare system adrift can be found, from the lack of resources to the psychological exhaustion of overworked and underpaid carers, not to mention the growing mistrust of patients in an anti-vax climate that is leading (particularly in Texas) to the re-emergence of long-eradicated diseases. It’s a militant and quite educational story about the decay of public medicine, the decriminalization of addiction, the devastation of fentanyl, the disaster of firearms, and even abortion rights.
This is a series that also aims to be highly technical from a medical point of view, diving wholeheartedly into realism, which is echoed in its almost documentary-like staging, bolstered by the absence of music and aestheticism. It’s a non-stop choreography in which the ever-moving camera gives the impression of circling around these doctors in a circular space with no vanishing line, where the action unfolds both in full frame and in the background, interweaving the various operations and diagnoses. This dynamic staging and fluid editing from one situation to the next provide an (intra)nervous narrative driven by outstanding performers. While there’s a lead role for the senior attending physician, all the characters are well-developed and nuanced, so that we become attached to each one of them, without having a single bad character. And the script presents them (and their working environment) well enough – thanks to a conventional but successful formula: it’s the first day of work for a few interns who, along with the viewer, discover the department – so that after about ten hours of on-call duty, a completely different staff is smoothly and seamlessly introduced at once. As the patients keep coming, the vulnerability and cracks of the humans beneath the scrubs are put to the test, adding to the medical plot, a character development shaded in the biases of each and every one.
It’s thrilling and moving (even heartbreaking at times), but also lighter at others, with small doses of well-timed humor providing much-needed breathing space between heartbreaking choices. If “The Pitt” takes up several conventional codes, it develops and modernizes them for a truly striking result. This renewal of codes is also achieved through the diversity of the medical service, without this ever being addressed as a subject (and rightly so). In short, it’s certainly a renewal of codes relevant to the times, but it’s never emphasized, and that’s important for a medical series that operates within the classic codes of white American television. Yes, it’s a ‘procedural’ show, but not only a damn good one, but on top of that it adds a breathtaking pace, incredible precision, and an overdose of emotions! Quite simply, it’s an addictive surprise – which consequently works better as a binge-watch than a weekly viewing due to its unity of time – and surprisingly stands out as the best American series of the year so far…